Littérature - Nous en sommes venus à croire

Je devins abstinente d'alcool après mon adhésion aux AA et, comme par miracle, le chaud courant de la réalité qui m'avait si longtemps effrayée m'enveloppa et me libéra aussitôt de la peur. J'ai cherché à en comprendre la raison. Avec la sobriété, un élément nouveau s'était infiltré dans ma vie. J'ai commencé à m'intéresser aux autres. "L'intérêt" et sa petite sœur, la considération, m'étaient inconnus. Je m'étais crue capable d'être amoureuse ; je m'étais crue une mère affectueuse ; mais ces émotions, je le vois maintenant, avaient été les déguisements de mon amour-propre. Rien ne pénétrait plus loin que mon égoïsme. Dès le début de ma sobriété, j'ai commencé à ressentir de la sympathie pour les autres buveurs, ensuite pour mes enfants, puis pour mon ex-mari. Cette compassion, accompagnée d'amour par la suite, m'ouvrit les portes d'une immense forteresse à l'intérieur de moi-même, et qui avait toujours été fermée à clef.